lundi 12 mai 2008

quand l'happy hour s'est terminé sur les coups de 22h30 nous nous sommes décidé d'un endroit pour aller manger. B. voulait absolument des frites mais après 5 verres de bière elle n'y pensait plus, au début tout était prévu pour que nous allions fluncher mais une majorité s'est décidé pour "l'as du falafel",sur le trajet L. nous entraîne dans un restaurant qui s'appelle je crois le "pick-pocks", le serveur entend par habitude "une table pour deux" et L. corrige "pour douze".

je prends la banquette, je me place au milieu de la longue table comme une enfant capricieuse qui veut être entourée, les autres viennent lentement se greffer autour et le hasard décidera des éléments qui constitueront les difficilement supportables extrémités. la gérante qui ressemble à diam's nous vide des bols de cacahuètes sur les tables, parfois une brève bataille commence entre les deux, je m'en reçois quelques unes dans la gueule, je me sens encore plus heureuse qu'à la cantine un mercredi de centre aéré, ces mecs ne savent absolument pas se tenir et c'est vraiment très réjouissant. quand K. va aux toilettes j'en profite pour prendre sa place, les plats ne sont pas encore arrivés, personne ne s'est rien attribué et j'ai vraiment envie de passer le repas à côté d'A. sinon ça va me frustrer, me ronger toute la nuit. je le suis à peu près partout, il sort trop souvent fumer et quand il tarde trop je finis par le rejoindre dehors. cet homme m'attire, je peux difficilement dire le contraire, il m'attire comme nicolas ker m'attirait, je fais avec le peu que je connais de lui, je reçois son intérêt comme une chance, je redeviens la groupie abrutie qui se sous-estime, la fille qui pense tristement dans le métro du retour, venant de lui je ressens comme un parrainage, comme s'il prenait soin de moi.

quand il m'embrasse sur les cheveux cela vaut tout les coca light du monde, quand il dit à la table "on a un point commun, on se déteste entre nous mais on adore vernis" et que tout le monde rigole et ne conteste pas j'ai juste envie de m'évanouir sous le poids du bonheur, quand il me demande comment je vais rentrer ce soir et qu'il me propose d'aller dormir chez lui parce qu'il s'inquiète de me savoir toute seule dans la nuit, qu'il me dit ça avec la plus grande bienveillance, sans arrière-pensée, ça me pète en deux. j'adore sa délicatesse, sa grâce, comme s'il maniait sans cesse son piano, sa voix parlée si proche de sa voix chantée, quand il me confie une "mission de confiance", que je suis là à attendre qu'il parle et qu'il finit par juste me confier son verre de vin que je garde près de moi. depuis ma place, tristement je le regarde fumer dans la nuit, parler avec les gens de son âge, j'essaye de savoir si je suis amoureuse de lui ou si c'est juste un caprice, une romance compliquée, "nerveuse" comme dirait Alister, un homme que je surestime aveuglement, comme si un peu de ma propre estime passait de son côté.

j'aimerais m'épancher sur le miracle de notre rencontre, je me surprends à ne plus me souvenir du tout premier contact, (réflexion) mh si en fait je me souviens, il m'a envoyé un long message sur proust car j'annonçais au forum que je me lançais dans la Recherche, ensuite il m'a demandé mon adresse postale pour m'envoyer des livres, "sur la lecture" et "contre sainte-beuve", je ne le connaissais pas et ça m'a gêné, il s'imaginait qu'une petite meuf comme moi flipperait de lui divulguer son adresse mais j'ai dû lui prouver le contraire, sa gentillesse désintéressée, protectrice, était déjà d'actualité. plus tard et assez spontanément il m'a dit qu'à tout moment je pouvais lui faire signe et que nous pourrions nous voir, que la déception était à prévoir mais que ce n'était pas important. en attendant je fantasmais sur son myspace, ses photos de mauvaises qualités où il était juste impossible de deviner son visage, deux ombres à la place des yeux et de très longs cheveux noirs, le mystère total, l'interdit et une tristesse nouvelle qui se dégageait de ces quelques indices qu'il m'accordait. l'écoute de ses chansons a été le choc sur le gâteau, ce qui allait faire la différence. normalement les belles chansons sont faites par des artistes morts ou appartenant à une autre galaxie où tout le monde parle anglais et qu'on ne peut approcher qu'avec des interviews ou depuis une fosse lors de concerts parisiens, j'achète leurs albums sans prendre la peine d'être admirative, considérant ça comme un gâchis d'énergie, mais là il y avait une proximité sans précédent qui faisait que je pouvais tout lui communiquer, tout lui donner, il était seul et il me sollicitait, le miracle réside dans le fait que je suis passée de l'adulation silencieuse à ses baisers sur mes cheveux, presque sans rien faire, sans acharnement.

la fête -boire, discuter, manger, rigoler- continue et s'annonce comme une évidence, une chose aussi appropriée aux circonstances qu'un sapin à noël, un besoin pour chacun dans une période où certains se sentait esseulé ou simplement désoeuvré. La réussite de ce rassemblement me saute aux yeux, tout est étonnamment parfait, ma salade, les blagues, chaque membre du forum, J-E qui raconte que pour chopper des meufs il faut pas leur demander leurs avis, qui broute la salade de L. et qui finit par lui cracher dans son verre de vin, P. qui me parle de Danielewski, qui nous montre comment il se connecte sur le forum depuis son Iphone, M. qui me fait du pied et qui veut m'embrasser sur la joue avec la langue, A. qui me tartine précautionneusement ma main tremblante avec le vernis bleu marine, B. qui me rate l'autre main, qui essaye mes talons, je ne peux pas faire autrement que de m'attacher à ces connards.
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nous papotons, appuyés dehors contre une voiture pleine de nos traces de doigts, pour la deuxième fois en une semaine on me dit que je ressemble "à la meuf du dessin animé là...Daria voilà", deuxième débat sur mes lunettes pour savoir si ça me va ou pas, parfois il y a des silences où chacun remarque alors la douceur de l'air et de la vie, j'esquisse un sourire et A. me demande "alors heureuse?", je me souviens avoir répondu "ouais trop", soulignant la perfection de cette soirée. on était les rois du restaurant, les verres de vin étaient remplis de sel, gâchés, la table gueulait, les coquilles de cacahuètes éclatées sur la table, l'addition impayable.
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je demande à A. ce qu'il y a dans son sac, il me dit des livres, il me les sort parce que je veux les voir. c'est encore Dennis Cooper, je crois que les trois étaient de lui, c'est F. qui lui en a parlé comme pour moi. j'ai encore l'image du "Salopes" écrit en bleu marine sur les étalages du Virgin de la Défense, je l'imagine lire ces livres tout seul chez lui, je pense à notre complicité née de nulle part, acquise d'un commun accord pour que les choses soient plus simples et aillent plus vite, je l'aime assez pour sauter des étapes, pour ne pas être difficile. nous sommes l'homme et la fille, j'aimerais qu'il voit les choses comme ça.
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01h30, les choses n'oublient pas d'avoir une fin et A. prend le taxi avec B., M., et D., je m'imaginais marcher dans la nuit avec lui, finir la soirée sur des paroles et des gestes somptueux mais toujours aussi frustrants pour pouvoir m'exciter toute une semaine. je le vois préférer le confort d'un retour rapide à une brève promenade en ma compagnie, les adultes sont fatigués et ne choisissent plus avec le coeur. avant de me laisser là sur le trottoir il m'embrasse encore les joues, il me dit de prendre soin de moi, qu'on se reverra comme il a des choses à moi, je lui dis "c'est ça le truc à faire pour se revoir", dans un dernier geste de confusion je l'embrasse sur sa joue, suivi de M. qui me prend par les hanches en dessous de ma veste et m'embrasse lentement sur les joues, ce mec est trop chaud, le taxi disparaît et je marche jusqu'au métro Hôtel de ville avec K. et R.
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R. me parle de ses cours, de sa dépression, ça me rembrunit complètement, trop de gens à soutenir et personne pour le faire, ma vie est nickel, je devrais penser à fermer ma gueule, il descend à Châtelet et je continue jusqu'à la Défense, je suis parfaitement fatiguée, je n'ai pas dormi cette nuit pour pouvoir mimer une révision de maths, ensuite le sommeil ne venait plus et je suis restée deux heures à cligner des yeux. bien sûr il n'y a plus de bus et je dois marcher 30 minutes interminables. il est tellement tard que sur les écrans des abribus il n'y a plus marqué "service terminé" mais "service non commencé" et ça me fait doucement rire.

3 commentaires:

Juliette a dit…

Tu as une jolie vie Mumu

Murielle Joudet a dit…

lol,
oui parfois c'est l'impression que tout ça me fait. mais finalement en lisant ce blog on peut se rendre compte que tout ça est très récent et forcément bref.

alcie a dit…

je suis voyeuse et je suis ta vie